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Avec les réfugiés syriens : « Des enfants qui gardent la faculté d’être heureux »
Si Louise Lagarde, s’est exilée au Liban, c’est par ce que cette Française de 23 ans, passionnée par la géopolitique du Proche-Orient, voulait connaître la réalité du terrain.
Elle est partie en octobre 2015, comme volontaire au sein d’Offre-joie, une association libanaise qui a ouvert une école au nord du pays, pour y scolariser des enfants de réfugiés. Son objectif était de séjourner quelques mois seulement, pour vivre une expérience de terrain, puis de revenir à Paris, pour y reprendre ses études. Finalement elle est restée. Elle finira son cursus en relations internationales à l’université Saint-Joseph de Beyrouth, où elle vient de s’inscrire.
Après huit mois d’expérience passés auprés des familles syriennes, les certitudes s’effacent, et les remises en question s’imposent : « Dans cette société, tout n’est pas aussi simple comme on le croit en Europe. Le côté manichéen, d’un côté les bons, de l’autre les terroristes, ne fonctionne pas. Les Alaouites ne sont pas tous pour Bachar al Assad, et les sunnites ne soutiennent pas forcément la rebellion syrienne ou les islamistes. Il existe dans ces familles rurales pauvres, un fort ancrage à la tradition, au village et au au clan que nous avons beaucoup de mal à comprendre en Occident. Les rapports hommes-femmes restent très conservateurs. L’honneur des familles passent par le comportement des filles et le regard des autres. »
Louise a acquis en quelques mois des notions d’arabe, qui lui permettent d’établir aujourd’hui des relations de confiance avec les familles de ses élèves (toutes sunnites). Elle reçoit les confidences des mères, connait les difficultés de ces syriens, qui après avoir tout perdu, se retouvent pour fuir le guerre, dans ce Liban voisin, où ils ne sont pas forcément les bienvenus.
Mais ce qui étonne la jeune volontaire, c’est l’envie de ces enfants de découvrir le monde, leur soif de savoir. « Ils me posent sans cesse des questions sur la France. Malgré tout ce qu’ils ont pu vivre, la guerre, l’exil, la destruction, l’obligation de travailler pour certains, afin d’aider leur famille, ils gardent la faculté d’être heureux. » Louise cite l’exemple du petit Hamad, 12 ans, qui durant les vacances, marche, chaque jour, trois quarts d’heure sous le soleil pour venir à l’école, « le seul lieu où il a le droit de vivre son enfance. »
Pour Louise, tout n’est pas facile ici : « Je n’ai pas grandi comme ces enfants, et eux n’adhèrent pas non plus à mon mode de vie. Mais il y a tellement de richesses dans ces rencontres, que je ne regrette pas mon choix.»
Luc Balbont