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Histoire du premier monastère libanais
Coincée entre une Syrie au nord et un Liban au sud ravagés par la guerre, la Vallée de la Qadicha est encore miraculeusement préservée de la violence. C’est au cœur de cette gorge libanaise, que se dresse le monastère de Qannoubine, où pour la première fois, au V é siècle, des hommes ivres de Dieu, s’organisèrent en communauté.
A l’époque, Qannoubine, œuvre de « Théodose le Cénobiarque » (424-529) responsable de tous les couvents de Palestine, n’était qu’un ensemble de grottes, où des ermites vivaient entre les travaux et la prière, dans une parfaite égalité hiérarchique. Ce n’est que par la suite, qu’un bâtiment sera construit. Un monastère où résidèrent entre 1440 et 1823, 24 patriarches de cette Eglise maronite, fidèle à Rome.
L’histoire de Qannoubine est une épopée digne des grands récits littéraires. On raconte ainsi que le Sultan mamelouk Barquq, chassé de son trône en 1389, y aurait trouvé refuge, caché par des moines. Légende ou non, l’anecdote est un exemple de fraternité islamo-chrétienne, dont on pourrait s’inspirer aujourd’hui.
C’est aussi à Qannoubine que le Patriarche Yohanna al Jagi se réfugia pour échapper au massacre commandité en 1440 par les soldats du pacha de Tripoli, et que le monastère fut mis à sac en 1726 par les sbires de l’un de ses successeurs tripolitains, furieux de ne pas avoir capturé Jacques Awad, un autre patriarche qu’ils recherchaient pour l’exécuter
Après les Mamelouks, les Ottomans en recherche de fonds taxèrent durement le monastère, en prélevant au passage des jeunes chrétiens pour en faire des esclaves ou des soldats. C’est à travers ces multiples épreuves qu’un esprit d’humilité, de courage, d’austérité et d’un sens de l’effort s’est forgé.
Entre travail, étude et prière
Comparé à l’actuel Patriarcat, la modestie du logis patriarcal (voir photo) donne une idée de ce qu’était la vie de la communauté maronite, humble, partagée entre le travail, l’étude et la prière. Les peintures murales sont l’œuvre d’artistes locaux, hommes de foi et prêtres, inconnus des listes des grands musées mondiaux. Dans l’une des salles, repose le corps momifié du patriarche Youssef et-Tyran, mort à Qannoubine en 1820. Tout au fond, une porte donne sur un espace, où subsiste la plus ancienne partie du bâtiment.
Le monastère est occupé aujourd’hui encore par Sr. Jeannette Fenianos et deux religieuses antonines (1) qui défient l’histoire, pour y maintenir un souffle de vie. Quinze siècles de présence ! Tant de puissantes cités ont disparu au fil du temps, ou ne sont plus que des ruines visitées par des groupes de touristes… Sans doute le miracle d’une puissance à mains nues, et d’une foi inébranlable qui se révèlent être souvent d’incroyables atouts.
Luc Balbont
- Nous reviendrons sur cette communauté prochainement
Notes : lire dans ce blog, le texte « rencontre avec Yves Prévost, le veilleur de la Qadicha » publié le 23 janvier 2023.