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Irak : un patrimoine religieux à sauver

Il y a très longtemps, bien avant la conquête de l’islam, cette région du monde s’appelait l’Assyrie. C’est ce que l’on découvre, en se penchant sur l'histoire de Mésopotamia, une association, qui depuis sa fondation en 2017 à Lyon, répertorie les édifices religieux chrétiens, mais aussi yazidis et juifs, rappelant que dans ce nord de l’actuel Irak, les temples, les mausolées et les synagogues avaient précédé les mosquées.

Sur le site de l’association, plus de 100 monuments (*2) sont décrits et photographiés pour le plus grand bonheur des amoureux du christianisme oriental.   

Il y a quelques semaines, j’ai reçu un superbe livre, dont les mots des différents collaborateurs (*3) et les images font comprendre à un large public, tout ce que l’Eglise romaine devait à cette civilisation syriaque. Un patrimoine mondial unique, que les djihadistes de Daëch s’évertuaient à raser à coups d’explosifs, de haches et d’incendies, durant les deux années où ils ont occupé la région, entre 2014 et 2016.

Pendant deux ans et demi, des équipe de Mésopotamia, experts, chauffeurs, interprètes, photographes ont sillonné trois provinces, Ninive-Mossoul, Kurdistan, et Kirkouk, ainsi que Bagdad la capitale du pays, recensant églises, cathédrales, monastères, couvents, mausolées, nécropoles et divers lieux de prières et de recueillements. Le couvent Mar Behnam à Khidhir Ilyas, saccagé, l’église catholique de Mar Touma à Mossoul, dévastée ; les mausolées de la communauté yazidie dans les monts Sinjar, pillés ... Un témoignage, fort, émouvant, un appel au souvenir, mais aussi à la mobilisation pour redonner vie à ces espaces de spiritualité, car Mesopotamia  s’applique  également à restaurer, au gré de ses moyens financiers. 

Même miraculeusement sauvegardés, comme au Kurdistan d’Irak, ou dans la province de Kirkouk, ces villes et ces villages ont vécu la menace de disparaître à jamais. Au fil des pages, on découvre bien d’autres joyaux sauvés. Des pierres certes mais, aussi des visages, des portraits de femmes et d’hommes qui s’efforcent de se remettre debout après avoir frôlé le pire.

 Parmi les textes de spécialistes, de religieux et d’orientalistes (* 3) qui s’intercalent dans les pages de cette aventure, celui du président de la société royale belge d’études orientales, Christian Cannuyer, qui rappelle  les liens qui unissent chrétiens et Yazidis : « dans le passé, écrit-il, les yazidis et les chrétiens irakiens ont déjà souvent fait preuve de solidarité face aux adversités communes… les souffrances qu’ils viennent de subir ensemble peuvent être vues comme une douloureuse étape vers le Bien final. »

Dans cette période morose, où l’on ne parle que de pandémie (la Covid-19 qui s’amplifie), que de guerres (le Haut-Karabakh, la Syrie ou le Yémen) que d’attentats djihadistes et de séparatisme, j’avais envie de raconter l’histoire d’une aventure heureuse de gens qui se rassemblent pour défendre  la vie.  

Luc Balbont

 (*1) « Mésopotamia », une aventure patrimoniale en Irak (textes en français, en anglais et en arabe). Sous la direction de Pascal Maguesyan –  Editions Première Partie 250 pages ; 39 euros - La Fondation Saint Irénée à Lyon est partenaire de « Mésopotamia »ainsi que l’œuvre d’Orient 

(*2)  www.mesopotamiaheritage.org

(*3) Marie-Ange Denoyel, Cardinal Barbarin, Narmin Ali Amin, Joseph Yacoub, Christian Cannuyer, Charles Personnaz